Stats et psycho: Le problème de Monty Hall

[2004-12-06 18:23:00]

Ma soeur m'a montré ce problème dans l'Incident bizarre du chien dans la nuit, un livre dont le personnage principal (à la première personne) semble être autistique. Ce problème de logique pose la question de la signification d'une probabilité et son usage, et montre bien à quel genre d'absurdité nous pouvons y arriver.

Le problème est le suivant:

Dans un jeu télévisé, le participant doit choisir entre trois portes, une avec une voiture, les deux autres avec une chèvre. Le participant choisi une porte qui reste fermée. L'animateur alors ouvre une des deux autres portes et montre qu'il y a bien une chèvre derrière cette porte. Il demande alors au participant s'il est sûr de son choix. Le participant doit-il ou non changer sa porte?

La réponse à ce problème se trouve en calculant les probabilités ou en faisant un diagramme des choix possibles. Au final, on finit par prouver que le participant a une chance sur 3 d'être tombé sur la bonne porte dès le départ et donc deux chances sur 3 de trouver la voiture s'il change de porte. Pourtant, l'intuition nous dit qu'il a deux portes dont une seule possède une voiture. Les chances devraient donc d'être une sur deux... C'est pourtant faux.

Un bon moyen de corriger cette intuition est en exagérant le problème, en prenant par exemple 1000 portes, puis en remplaçant la voiture par une porte piégée. Vous n'aurez aucun problème de désigner une première porte comme n'étant pas piégée. Vos chances qu'elle le soit sont de 1 sur 1000. Après que l'animateur est ouvert les 998 autres portes, vous êtes rendu pratiquement certain que celle qui reste fermée, en plus de la vôtre, est piégée. Moi, en tout cas, je ne prendrai pas de risques et garderait la mienne, étant sûr à 99,9% que ma première porte ne l'était pas. Beaucoup plus évident vu ainsi, n'est-ce pas?

Que s'est-il passé? Primo, en mettant 1000 portes, j'ai grossi la différence entre les probabilités réelles. Au lieu de 1/3 vs 2/3, on a maintenant des chances plus fortes de 1/1000 vs 999/1000. Les risques de se tromper diminue, ce qui est rassurant. Ensuite, j'ai modifié l'appas du gain par l'instinct de survie. L'être humain a tendance à augmenter ses chances d'obtenir une victoire qu'une défaite. C'est un optimiste de nature, surtout s'il n'y a rien à perdre. En transformant le problème de gain possible en prise de risques, je désactive ce mécanisme optimistique.

Il ne faut pas sous-estimer cette forme de psychologie, elle est très forte. C'est ainsi que la lotto et les casinos fonctionnent aussi bien: on a beau se dire qu'une seule personne peut gagner, on continue à croire, même parmi des milliers de participants que cette personne pourrait être nous. Cet optimisme est essentiel à la survie pour une espèce hiérarchisée comme la notre, car sur une centaine d'individus, un seul pouvait devenir le chef et procréer. Les individus qui avaient donc le plus de chance de s'accoupler était donc ceux qui croyaient avoir encore une chance même si cette dernière était très faible.

L'optimisme du gain n'est pas la seule psychologie qui affecte notre perception des probabilités et de la logique en général. Un article de l'an passé dans Cerveau et Psycho parlait aussi du mécanisme du tricheur: on serait meilleur à trouver la solution à un problème si le résultat consiste à trouver une situation de triche (par exemple, repérer un mineur qui prend de l'alcool parmi plusieurs clients) qu'une situation neutre (par exemple, repérer un chiffre qui ne serait pas noir). J'y reviendrai plus tard.